lucperino.com

Supplique contre le masque à l’école

humeur du 24/08/2021

Intuitivement, le masque est utile en cas d’épidémie de virose respiratoire. Confirmer cette intuition nécessiterait des études que personne ne se risquera à faire pour deux raisons : la dramaturgie politique qui entoure ce sujet, et l’impossibilité de définir le critère « port du masque ». Les rares études sérieuses ont été faites en milieu hospitalier où le masque est utilisé de façon professionnelle : en usage unique et sans manipulations. Les résultats sont modestes, montrant une diminution de transmission d’environ 20%.

Dans la rue, l’école, les métros ou les magasins, il suffit d’observer son utilisation pour être certain qu’il est inutile. Ses manipulations et positions successives sous le nez, le coude ou le menton pourraient même majorer la transmission cutanée.

Puisque la science et l’intuition sont contradictoires, il nous reste l’observation rétrospective des faits : les diverses législations sur le port du masque en divers pays et lieux ne semblent pas avoir modifié la dynamique des vagues. Constatation scientifiquement irrecevable, je l’admets, tout autant que d’imaginer des scénarios sans ces législations.

C’était donc plutôt la science qui avait fait évoquer l’inutilité du masque, et c’est plutôt la politique et l’irrévocabilité de l’intuition qui ont fini par l’imposer. La vie n’est pas un protocole d’essai épidémiologique. La vraie vertu du masque est fédérative, en montrant l’effort de chaque citoyen. Il constitue aussi un message politique : s’afficher masqué dans un studio de télévision montre une détermination à poursuivre l’action.

Le masque à l’école doit aborder d’autres registres : sciences cognitives, psychologie, écologie comportementale, éducation. Domaines où l’épidémiologie est plus complexe, puisque les critères ne sont jamais binaires comme le port ou non du masque (binarité à multiplier par ses diverses positions : nez, coude ou menton), et les résultats sont à plus long terme. Il est plus difficile d’évaluer un déficit cognitif ou une inhibition sociale qu’un ratio de tests positifs ou d’admission en réanimation. Certes, nous avons déjà plusieurs études convergentes sur les risques psycho-sociaux du masque pour les enfants. Je passe sur l’importance du module cognitif de reconnaissance des visages dans le neurodéveloppement des nourrissons, car on me reprochait, à raison, une extrapolation abusive chez les écoliers.

Aucun argument épidémiologique n’est assez solide, ni pour imposer le masque à l’école ni pour le contester. Le choix est donc politique, d’autant plus délicat que l’intuition peut se muer en psychorigidité chez certains enseignants ou parents d’élèves.

La France, en gardant les écoles ouvertes plus longtemps que dans d’autres pays, a déjà prouvé que cela ne constituait pas un surrisque. Toutes les bribes de science convergent vers un rapport bénéfices/risques du masque à l’école, nul à court terme, négatif à moyen-terme et à long terme. Enfin et surtout, l’école doit être un lieu où l’on se sent bien.

Bibliographie

Bussy G, Mériaux J, Muneaux M
Le port du masque à l’école élémentaire entrave l’apprentissage des enfants
Le Monde, 20 nov 2020

Isabelle Barth
Le port du masque, comme préoccupation constante, parasite les ressources cognitives
Le Monde, 14 sept 2020

Jefferson T, Del Mar CB, Dooley L, Ferroni E, Al-Ansary LA, Bawazeer GA, van Driel ML, Jones MA, Thorning S, Beller EM, Clark J, Hoffmann TC, Glasziou PP, Conly JM
Physical interventions to interrupt or reduce the spread of respiratory viruses
Cochrane Database of Systematic Reviews 2020, Issue 11. Art. No.: CD006207
DOI : 10.1002/14651858.CD006207.pub5

Ludvigsson JF, Engerström L, Nordenhäll C, Larsson E
Open schools, Covid-19, and child and teacher morbidity in Sweden
N Engl J Med. 2021 Jan 6
DOI : 10.1056/NEJMc2026670

Prescrire rédaction
Grippe, coronavirus, masque et prévention des infections respiratoires
Prescrire, 2020, 40 (437) : 209

Prescrire rédaction
Covid-19 : les masques diminuent peut-être en partie la transmission du coronavirus en population générale
Prescrire, juin 2020, 40 (440), 445

RARE

Site médical sans publicité
et sans conflit d'intérêts.

 

Vous aimerez aussi ces humeurs...

Absolu ou relatif : il faut choisir - Imaginons un médicament qui procure des effets indésirables à 5% des personnes qui le [...]

Prodigieuse paraclinique - Les examens « paracliniques » désignent les innombrables techniques qui complètent [...]

Trump le monofactoriel - En matière médicale, la notion de plurifactoriel (ou multifactoriel) est la plus complexe à [...]

Vaccins en général et en particulier - La communication sur les vaccins se fait souvent sans nuance, tant par les ministères qui les [...]

Les deux types de drogue - Les drogues sont un sujet politique rare et sporadique. Il n’est traité que lorsqu’il [...]

La phrase biomédicale aléatoire

Tant qu'on fera usage des remèdes composés de la pharmacopée galénique, tant que la routine continuera à dicter aux médecins les formules compliquées d'un plus ou moins grand nombre de médicaments, on ne pourra jamais rien savoir sur leurs véritables propriétés. L'ancienne école de Cos employait des remèdes simples ; elle ne se servait point de ces mélanges informes qui surchargent nos dispensaires ; elle ne mêlait point, dans les mêmes décoctions, une douzaine de plantes qui ne peuvent que les rendre épaisses, visqueuses et dégoûtantes ; elle ne connaissait point les apozèmes compliqés, les tisanes royales ; ces indications multipliées, qui font la base de l'art de formuler, n'existaient pas pour elle ; simple comme la nature dans ses opérations, elle ne présentait aux malades qu'un seul remède, et elle ne les administrait que l'un après l'autre lorsque les circonstances exigeaient qu'on en changeât la nature. Si on ne renonce à ce luxe dangereux, introduit par l'ignorance et la superstition, si l'on tient toujours au mélange d'une base médicaenteuse, d'un adjuvant ou auxiliaire, d'un ou plusieurs correctifs, mélange dont on a fait un art que je ne dois pas craindre de présenter comme illusoire et dangereux, la science restera dans l'état ou elle est.
― François Fourcroy en 1785

Haut de page